Quatrième de couverture

Vincent, dans la fleur de l'âge, a tout pour être heureux. Mais le bonheur n'est pas si simple à gouverner. Un beau jour, le jeune cadre promis à un brillant avenir plaque tout et recommence à zéro, avec un esprit de méthode très particulier.

« A l'école, à l'université, je voulais tout comprendre, que rien ne m'échappe, ne reste obscur. Les mathématiques exerçaient sur moi une fascination particulière parce qu'elles se déploient majestueusement, théorème après théorème, comme une fougère en pleine croissance, et se déroulent jusqu’à atteindre, en extension maximale, la pointe de chaque démonstration. Je voulais travailler sur des questions qui après mon passage rendent l’âme pour de bon, et qu'il ne faille plus revenir là-dessus.
Les maths ont presque tenu leurs promesses, presque mais, comme chez les Gaulois, il reste un village qui refuse de se soumettre, un groupe de propositions indécidables, un principe d'incertitude ou un théorème d'incomplétude, et ce petit défaut dans l'édifice gâche tout - c’est la verrue sur le nez de Cléopâtre. »

On ouvre le livre d'Élisa Brune comme une boîte à musique, et on tombe sous le charme d'une drôle de mélodie, toujours juste même si elle joue sur nos dissonances, cristalline même quand elle se fait cruelle. Entre observations réalistes – les tableaux de la vie professionnelle d'un jeune cadre sont à se pincer de justesse et d'humour – et considérations métaphysico-scientifiques, une subtile vérité se fait entendre. Même les scènes les plus torrides, relatées du point de vue masculin avec une vraisemblance audacieuse, sont imprégnées d'une fraîcheur poétique, à l'image de l'auteur, une jeune femme talentueuse, impertinente et mystérieuse.  

Autrement dit présente "Petite revision du ciel" d'Elisa Brune à deux voix.


Extraits de presse

L'aisance avec laquelle cette jeune femme s'est mise dans la peau d'un homme qui est mal dans la sienne, son brio, son intelligence, sa drôlerie, la rigueur économe de son écriture sont tout simplement confondants.

Dominique Jamet – Marianne – 08/11/1999

 

Roman métaphysique, roman du quotidien, roman sensuel et même torride en certains épisodes, Petite révision du ciel est aussi le lieu d'un défi littéraire: celui d'une femme qui choisit d'adopter le point de vue masculin de son narrateur pour décrire la vie et l'amour, jusqu'aux émotions les plus intimes... Un livre d'une grande subtilité.

René Begon – Le Matin – 31/08/1999

 

Il s'agit d'un livre bourgeonnant de vie au centre duquel l'amour reste la plus énigmatique des équations. Dans les pas de Vincent, ce sont les vraies richesses que l'on traque, sans niaiseries chichiteuses ou sucrées, mais toujours avec cet oeil grand ouvert, à la fois impitoyable et fraternel, lavé des sanies du plan de carrière et des stupides contraintes de l'ambition. Avec, aussi, de la chair qui donne, qui prend, qui jouit, qui invente, et qui se raconte de façon d'autant plus étonnante que l'érotisme se vit ici d'un point de vue exclusivement masculin.

Ghislain Cotton – Le Vif / L'Express – 3/09/1999

 

Ce livre est un vrai roman, d'amour qui plus est, charnel, drôle, superbement écrit, inattendu jusque dans l'observation de nos semblables et redoutablement intelligent. Il possède aussi ce qui ressemble pour le profane à une sorte de géométrie fractale, uniforme vue de l'extérieur mais pleine d'anfractuosités dès qu'on s'en rapproche.

Sophie Creuz – L'Echo – 14/09/1999

 

Petite révision du ciel est un roman d'aventure intellectuelle. Il s'y passe donc, en dépit de la stagnation qu'il semble décrire, énormément de péripéties: une (calme) tempête sous un crâne...

On sort d'un texte d'Elisa Brune avec le sentiment d'être plus futé.

Pierre Mertens – Le Soir – 29/09/1999

 

On ne quitte pas le roman d'Elisa Brune. Elle pose un regard piquant et éveillé sur nos redditions à une existence dont nous acceptons, souvent sans trop réfléchir, les modes, les conventions, voire les incongruités. Elle cerne avec une troublante complicité le personnage attachant d'un homme qui préfère se mettre en danger que se couler dans un destin programmé pour lui et, à la limite, sans lui. Elle a de la lucidité, de l'insolence, de l'humour, de l'audace. Et beaucoup de cette intransigeance qui plaide pour la jeunesse d'esprit.

Monique Verdussen – La Libre Belgique – 13/10/1999

 

C'est un premier roman étonnant tant on y trouve une vraie plénitude d'écriture et un achèvement. D'emblée et à bas bruit, cette jeune femme de trente-deux ans impose un lent tempo des mots, qu'elle maintient tout au long de son livre. Embarquant son lecteur dans un curieux parcours intime. Contrepoints ténus et associations libres. On est sous le charme. Elisa Brune a écrit juste. Rejoignant avec une intelligence sensible la littérature discrète du glissement des sentiments.

Xavier Houssin – Point de Vue – 08/03/2000

Premières pages

Je n'ai pas su l'expliquer aux autres. Moi-même, je n’étais pas sûr de bien me comprendre. J'ai senti qu'il fallait le faire, c'est tout. C'était un mouvement naturel et presque indépendant de moi, comme de chercher la surface quand on est plongé dans l'eau. J'ai émergé à l'air libre de la rue, et ce building m'est apparu comme un aquarium où nous vivions en apnée à longueur de journées. J'avais bien fait de donner ma démission.

Gisèle n'a pas poussé les hauts cris, n'est pas devenue hystérique. Gisèle n'a rien d'une femme banale. C'est la femme que j'aime, pour autant que je connaisse quelque chose à l'amour. Ou que j'aimais, car j'ai décidé de la perdre. Elle a essayé de me comprendre, elle a voulu discuter calmement, mais sa sollicitude, sa douceur, son intelligence même, m'ont pesé autant que si elle m'avait condamné. Je voulais douter de moi jusqu'au bout, et non subir des assauts de gentillesse. Je lui ai dit que j'avais besoin de poursuivre mon chemin tout seul. Elle a protesté un moment et puis a respecté ma solitude aussi. Elle est beaucoup trop forte pour moi.

J'ai tout quitté sans savoir où aller. Un jour, il faut lâcher le bord de la piscine, me disais-je pour me réconforter. J'avais assez d'argent de côté pour pouvoir me permettre d’hésiter un an ou deux. Je me disais que je trouverais bien une idée dans l’intervalle. J’ai passé six mois déjà à déambuler, lire, rêver, voyager, essayer de découvrir à quoi je pourrais consacrer les années qui me restent. Aucun projet bien défini ne s’est dessiné jusqu’à présent. La vie que j’ai quittée était exemplaire, manifestement réussie, et pourtant je n'ai pas le sentiment d’avoir atteint grand-chose. Dix-huit ans d’éducation standardisée, cinq ans pour obtenir ma licence en math et ma spécialisation, dix ans d’agitation dans nos circuits économiques, et je me retrouve à trente-trois ans avec le sentiment de m’être laissé berner. Arrêté sur le côté, je regarde défiler mes semblables. Chacun me semble crispé dans un effort permanent pour accompagner le courant. Je n'ai pas compris le sens de ce remue-ménage. Je soupçonne qu'il n'y en a pas. Pas d'autre qu'une sorte de sens commun par lequel on se réchauffe les uns les autres. 

La seule chose importante qui me soit arrivée, c'est Gisèle. Je l’ai quittée. Elle souffre à cause de moi, pendant que je cherche encore ce que souffrir veut dire. 

Quand nous nous retrouvions le soir, elle m'embrassait toujours en plaquant son corps contre le mien. Ce n'était pas un de ces baisers distants que l'on donne en s’occupant déjà d’autre chose, non, elle mettait à me retrouver la même énergie heureuse qu'à engloutir un gâteau ou à s'offrir une nouvelle robe. Il ne fait aucun doute que j'aimais cette force qui l’habitait. Je m'en suis régalé. 

Mais un jour il vous manque quelque chose et on veut savoir quoi.